Dans son travail sur les représentations sociales de la psychanalyse, Serge Moscovici a trouvé trois observations troublantes à propos de la pensée naturelle : (a) Les participants dans cette étude utilisent leur intelligence concret au lieu l’intelligence abstrait, (b) La pensée d’adulte implique les éléments de la pensée enfantine ; une sorte de globalisme ou syncrétisme, dirait Piaget, (c) Le même individu emploie une pluralité de styles de pensée.
Ces observations conduisent Moscovici à concevoir une hypothèse qu’il nomme la polyphasie cognitive. Il s’agit d’un état où plusieurs modalités différentes de pensée et de connaissances coexistent simultanément chez un individu ou un groupe social.
Le même individu peut avoir une perspective moderne sur certaines choses mais traditionnelle sur d’autres. Il peut adopter des points de vue scientifiques en pratiquant toujours des rituels.
Un scientifique par exemple n’est pas entièrement absorbé par la pensée scientifique. Il peut être aussi un credo religieux, consulte l’horoscope et développe certaine idée raciste (p.251, 2013).
Cette hypothèse amène plusieurs implications. Premièrement, on ne doit pas attendre de constance ou d’uniformité chez un individu ou un groupe. Au contraire, on doit se préparer à accueillir la variation voire le conflit des attitudes, des comportements, des représentations chez l’individu ou la société.
C’est un fait selon Moscovici que les individus sont capables d’exploiter différents modes de pensée et différentes représentations en fonction de leur appartenance à un groupe spécifique ou du contexte dans lequel ils évoluent.
On ne peut plus conclure d’une façon générale qu’un individu est par exemple dogmatique, rigide et caractérisé par un système mentale qualifié de clos. Moscovici rappelle que ce même individu peut aussi montrer de la tolérance et avoir l’esprit ouvert en tant qu’artiste, savant, étudiant, etc (p.280, 1976).
Les individus sont monophasiques ; ils sont munis uniquement d’un mode principal de pensée ; les autres modes ne sont que des vestiges accessoires. Tout cela est donc annulé par l’hypothèse de polyphasie cognitive. Telle est sa deuxième implication.
En proposant cette hypothèse cognitive, Moscovici dénonce Auguste Comte qui soutient une seule et unique forme de pensée i.e la science.
Comte est persuadé que la science finira par s’imposer et que les autres mode de pensée disparaîtront. Cependant, Moscovici avance que toutes les cultures connues ont toujours vu coexister plusieurs formes de pensée.
La troisième implication est que l’on doit concevoir les systèmes cognitifs comme des systèmes en développement et non uniquement comme des systèmes qui tendent à l’équilibre. L’état de polyphasie cognitive se caractérise par la tension car il s’agit de diverses formes de pensée conflictuelles.
Finalement, Moscovici souligne que cette coexistence de systèmes cognitifs devient plus la règle que l’exception. Il pense que l’on ne pourrait pas parler d’esprit humain si ces diverses formes de pensée conflictuelles ne co-existaient pas dans l’esprit.
La polyphasie cognitive est peut-être une hypothèse trop générale, avoue-t-il. Toutefois, il affirme que l’on ne peut pas remettre en cause son adéquation.
Veuillez trouver « la théorie de représentations sociales » ci-joint. REPRESENTATIONS SOCIALES-UNE INTRODUCTION
Un grand merci à Mme Pou 💜
2 réponses à “La pensée naturelle et l’hypothèse de la polyphasie cognitive”
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