La loi sur le mariage dans une société patriarcale

La société patriarcale indonésienne se manifeste également par la loi notamment quand elle régule les relations entre les femmes et les hommes à l’instar de la loi du mariage n° 1 du janvier 1974 (UU Perkawinan). Cette loi s’avère être le résultat du long combat mené par des militantes des droits des femmes contre la pratique de la polygamie.

La polygamie pratiquée par le premier président Soekarno en 1952 a exalté davantage leur lutte. Etant donné la situation de cette époque-là, M. Darwin (2004) estime que cette loi est une avancée prudente vers l’égalité entre la femme et l’homme. Son avis est exact si on ne se réfère qu’à l’article 1 qui énonce le principe de la monogamie. Pourtant, les dispositions de ses articles 3, 4 et 5 autorisent toujours la pratique de la polygamie.

L’Etat indonésien agit insidieusement, de manière subtile et stratégique pour dissimuler ses véritables intentions. Il contente les revendications des militantes des droits des femmes en consacrant le principe de la monogamie dans l’article premier. Puis il les anéantit soigneusement étape par étape.

Voici une partie de la loi du mariage envers laquelle ces militantes proposèrent un amendement. Constatez que l’article suivant annule l’article précédent. 

Article 1

Le mariage est un lien intérieur et extérieur entre un homme et une femme en tant que mari et femme dans l’objectif de former une famille) qui se fonde sur la divinité du seul véritable Dieu. 

Article 2

  1. Le mariage est légal lorsqu’il se fait selon le règlement de chaque religion.     
  2. Tout le mariage doit être enregistré selon la loi appliquée.

Article 3

En principe, un homme n’a le droit que d’avoir une seule épouse et une femme un seul époux. Le tribunal peut donner la permission à un homme d’avoir plus d’une épouse si tous les deux sont d’accord. 

Article 4

  1. Dans le cas où un homme veut avoir une autre épouse comme marqué dans l’article 3 de cette loi, il est obligé de faire la demande au tribunal de son domicile. 
  2. Le tribunal pourra lui permettre d’avoir plus d’une épouse selon les conditions suivantes : son épouse actuelle :  

(a) ne peut pas remplir ses obligations en tant qu’épouse,

(b) devient handicapée ou est atteinte d’une maladie incurable,

(c) ne peut pas avoir de progéniture.

Article 5

  1. Pour pouvoir demander la permission du tribunal comme écrite dans l’article 4 (1) de cette loi, les critères ci-dessous doivent être remplis : 

        (a) L’épouse actuelle / les épouses actuelles doivent donner (son) leur accord ; 

        (b) Le mari doit garantir qu’il subviendra aux besoins de ses épouses et de leurs   enfants;

      (c) Le mari doit garantir qu’il traitera ses épouses et ses enfants avec droiture.

2.  L’accord dans l’article 5 (1) n’est pas nécessaire dans les conditions suivantes : soit  on ne peut pas le demander à l’épouse ou aux épouses ; soit elle ne pourra pas / ne pourront pas signer l’accord ; soit on n’a pas eu de ses/leurs nouvelles pendant au moins deux ans ; soit dans autres conditions acceptées par le juge du tribunal. 

Article 31 

  1. Le droit et le statut de l’épouse et égale de ceux de son mari dans la vie conjugale et bien dans la vie sociétale. 
  2. Le mari et l’épouse ont le droit de faire « action en justice »
  3. Le mari est chef de famille et l’épouse est femme au foyer

Article 34

1. L’époux doit protéger sa femme et subvenir, selon ses moyens, à tous les besoins du ménage.

2. La femme doit gérer les affaires du ménage aussi bien que possible.

3. Si le mari ou la femme se dérobe à ses obligations, l’autre peut porter plainte auprès du tribunal.

Le principe de la monogamie consacré par l’article 1 est annulé par les articles 3 et 5 (1). Jusque là, il apparait que cette pratique n’est possible que si la femme accepte que son mari se remarie. Plus loin, l’article 5 (2) annule ce critère en précisant que le consentement de la femme n’est pas nécessaire dans certaines conditions.

Comme cela semblait insuffisant aux yeux de ses rédacteurs, cet article énonce une condition qui simplifie toute la procédure de la polygamie : l’homme n’a pas besoin de l’accord de sa femme si cette dernière ne peut pas signer l’accord.

En pratique, l’homme peut facilement employer cette condition sans avoir besoin de prouver que sa femme ne peut pas signer l’accord.  

Avec une telle loi, les Indonésiens peuvent toujours se remarier avec d’autres femmes. Ils ne se sentent donc pas obligés de demander le divorce. Cette loi s’applique pour tous les Indonésiens, quelle que soit leur religion.

Néanmoins, les chrétiens se sentent obligés de se convertir à l’Islam temporairement pour se remarier sans divorcer de leur première épouse. Ce qui contribue à rendre une mauvaise image de l’Islam, à savoir comme une religion permettant la polygamie.

Pourtant même les musulmans ont des avis divergents sur ce sujet. Les militantes des droits des femmes ne pensent donc pas que cette loi soit une réussite pour eux.

De plus, l’article 4 (2) montre que la femme n’est qu’un objet utile que le mari peut facilement remplacer si elle ne correspond plus à ses attentes. Il lie aussi la femme à l’obligation de procréation.

C’est toujours la faute de la femme si un couple n’a pas d’enfant après un an de mariage. Le mariage est conçu, selon cette loi, uniquement pour satisfaire le désir biologique et engendrer une descendance.

Cette loi préserve effectivement le stéréotype et le rôle traditionnel des femmes. Cela s’intensifie dans l’article 31 (3) qui déclare fermement que le rôle d’un mari est d’être le chef de famille et celui de la femme d’être une femme au foyer.

Le rôle du chef de famille annule brutalement l’égalité entre le mari et l’épouse. Ce rôle élève les hommes en position supérieure : comme un chef, il a le droit de diriger la famille et sa femme a le devoir de se conformer à ses opinions.

L’article 34 confirme cette normalisation du rôle en ajoutant que la femme doit gérer la gestion familiale avec ce que son mari lui fournit. Cela signifie également comme il l’est inscrit dans l’article 34 (1) que c’est le mari qui doit (et a le droit de) travailler.

Cela pose plusieurs problèmes encourageant le processus de l’appauvrissement des femmes de plusieurs façons. 

Premièrement, cette manière de procéder à la normalisation du rôle contraint une des parties (l’épouse) à être dépendent économiquement de l’autre (le mari). Dans de nombreux cas de violence conjugale, les femmes victimes ne peuvent pas sortir du cycle de la violence à cause de cette dépendance économique à leur mari.

Deuxièmement, à cause des articles 31 et 34, on considère que la force de travail des femmes est moins importante que celles des hommes car elles sont entravées dans un rôle supplétif en tant que soutien supplémentaire de famille.

De plus, à cause de cette approche du couple, les femmes mariées qui travaillent sont toujours considérées comme étant célibataires : elles ne touchent jamais les allocations familiales. Il n’y a que les hommes mariés qui sont éligibles à ces aides sociales.

Pourtant, il y a beaucoup de femmes qui travaillent surtout depuis que le président Suharto adopta la politique de développement. La plupart de ces femmes sont effectivement les ressources principales pour leur famille parce que leur mari ne travaille pas, ou parce qu’il est décédée ou enfin, car ils sont divorcés.

Révisé par Claude F.

Merci, Claude 😊

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